Le centenaire de la mort de Paul Bert
C’est en 1986 que François Miterrand vint à Auxerre pour commémorer le centenaire de la mort de Paul Bert. A cette occasion, Jean Pierre Soisson a préparé un discours long d’une vingtaine de pages, discours d’une large culture et d’une grande élégance.
A l’arrivée du président, il me confie son texte et ajoute : « avant de monter à la tribune, vous me le présenterez ».
La visite officielle d’un président de la république est un évènement tant dans son organisation que dans son déroulement . C’est pourquoi je ne manque pas de suivre au plus près le président et le maire lors de la montée des marches de la mairie.
Tous deux se retirent un instant dans le bureau de Jean Pierre Soisson.
Je passe alors dans la salle du conseil municipal où les discours sont retransmis en direct devant les chaines de télévision.
Jean Pierre Soisson ouvre la porte de son bureau, se dirige vers la tribune, me tend la main pour prendre ses documents … je les ai oubliés dans ma voiture garée sur le parking de la mairie.
Je me précipite hors de la salle pour aller les chercher.
Deux minutes plus tard je suis de retour… mais Jean Pierre Soisson a déjà commencé son discours. Je me place devant lui, son dossier dans ma main, prêt à lui donner au cas où sa mémoire connaitrait une défaillance.
Je suis tendu, mon cœur bat fort car je crains le pire.
Vingt minutes plus tard, il achève brillamment son intervention et reçoit des applaudissements nourris.
Voyant cela, François Miterrand écarte ostensiblement son dossier et évoque Paul Bert avec force et convictions, sans notes durant 35 minutes.
Deux grand orateurs réunis à Auxerre, un après- midi de rêves qui aurait pu mal tourner s’ils ne s’étaient pas imprégnés de leurs textes en le préparant, s’ils n’avaient pas fait corps avec leur sujet, s’ils n’avaient pas cru en ce qu’ils disaient.
Par la suite, Jean Pierre Soisson me rappela régulièrement de ne pas oublier son discours.